Habib Tengour

Habib Tengour Poems

Sea, you look at it you search for
a word
Waves strike the reefs
...

If he comes to interrogate a half-burned trace,
he does so impelled by an atavism or rather
a jealously guarded technique.
He has woven the poem in secrecy.
...

There's nothing. Renew the experience?
The pain loses all materiality.
At the moment of breaking camp,
the heart grows heavy.
...

She has never left that trace that sometimes can be read in the rock. Everyone localizes there where a
...

NINTH hour the stranger takes hold of my soul
making its way in winter and hunger pale
at a doorstop there you bend over in the night
to consult your life the one transcribed
...

window feast
inclines the gaze

she says: tear me away
...

Grooves calcinated remains
Dwelling emptied of dreams
You exhausted the gaze of all the designated spaces
To die the path
...

Gray this voice
goes to earth
worried
oh
...

I.
A première vue, ce ne sont que des jeux incohérents. Des remplissages grotesques. Un non-sens exhibé. Voire une impression de platitude. Des variations formelles pour le plaisir d'une élite. Un élixir ! Le lecteur d'aujourd'hui s'ennuie devant la complexité des techniques mises en œuvre. Il n'entend rien à toutes ces expérimentations délurées du langage. Les journaux lui parlent autrement. Chaque jour une catastrophe nouvelle le plonge dans l'angoisse. Du sang éclabousse les récits rapportés. Une trame d'éléments imprévisibles où se discernent mal les fils d'or de la broderie.

II.
La contrainte exercée fausse la syntaxe. Des décalages s'insinuent dans la distorsion du vocabulaire. La narration n'obéit à aucune causalité. Les événements se succèdent à l'identique. Cela amuse quelques stylistes qui voient là une liberté exemplaire. Mais les jongleries ne parviennent pas à faire taire les ventres creux. On se heurte de partout à un sens douteux. On cherche les mots qui tranchent pour avoir le dessus. En réalité les choix restent restreints. Les noms prédominent sur les verbes et les adjectifs. Toponymes terribles. Obscénités ciselées. Blasphèmes irrémédiables. Scatologie malsaine. Noms d'animaux ou de gens répugnants. Désignations de certaines parties du corps. Tout ça grouille dans une trivialité qui provoque un léger dégoût.

III.
Ça frise la polyphonie macabre. On ne s'écoute plus au milieu du tableau. Chacun trouve son compte dans l'affaire, dit-il. Mais le compte n'est pas bon. Il ne s'agit pas d'un simple trait de plume. Tu vois combien le moindre mot pèse sur la langue. Le débusquer n'a pas été de tout repos. Tu souffres devant les contradictions du lexique avec l'espoir de plus en plus réduit de trouver une issue. La parole n'est jamais libre ni profuse malgré les signes d'ouverture. C'est un saignement qui ne tarit pas. Un couleur locale sans l'emphase du temps.

Au delà, un vide apparent produit un effet de contraste.
...

I.
At first sight, they are only incoherent games. Grotesque fillers. Show-off non-sense. Smacking of the platitudinous. Formal variations for the pleasure of an elite. An elixir! Today's reader is bored faced with the complexity of the techniques put into play. He understands nothing of all these sassy-smart experiments with language. The newspapers speak differently to him. Each day a new catastrophe engulfs him in anguish. Blood all over the reported stories. A woof of unforeseeable elements where it is difficult to recognize the golden threads of the embroidery.

II.
The practiced constraint falsifies syntax. Intervals insinuate themselves into the distortion of the vocabulary. The narrative obeys no causality. Events follow each other without any change. This amuses some stylists who see in it an exemplary freedom. But such juggling is incapable of silencing the empty bellies. Everywhere one bumps into a dubious meaning. One looks for words with an edge to get the upper hand. In fact, the choices remain limited. The nouns prevail over the verbs and adjectives. Terrible toponyms. Chiseled obscenities. Irremediable blasphemies. Unhealthy scatologies. Repugnant names of animals or people. Earmarking of certain body parts. All of which teems in a triviality that provokes a slight disgust.

III.
It borders on a macabre polyphony. One doesn't listen to one another anymore in the middle of the tableau. There's something in it for everyone, he says. But it doesn't add up. It is not a question of a simple stroke of the pen. You see how heavy the slightest word weighs down on language. To ferret it out hasn't been a picnic. You suffer faced with the contradictions of the lexicon in the ever slighter hope of finding a way out. Language is never free or profuse despite signs of an opening up. It is a bleeding that can't be staunched. A local color lacking the emphasis of time.

Beyond that, an apparent emptiness produces an effect of contrast.
...

Il n'y a rien. Renouveler l'expérience ? La douleur perd toute matérialité. Au moment de la levée du camp, le cœur se serre. L'œil se contracte. Un horizon vide.

Qu'à cela ne tienne ! Les plaisirs du corps ne sont pas vains. Ils illuminent l'âme comme le luminaire de l'ermite…
Sur l'Euphrate, les vents se déchaînent pour te rappeler l'épouvante d'une nuit sacrée et l'éclat de tes frasques.

L'évocation suggère quelques images voilées à l'assaut d'une mémoire incertaine. Avec patience, tu charges les mots de subvertir la trame du poème pour transmettre une respiration. Peu importe si les bêtes sauvages ne quittent pas leur tanière pour te tenir compagnie.
...

Elle n'a jamais quitté cette trace qui se lit dans la roche quelquefois. Chacun localise là où une nostalgie le presse. Pour la décrire tu invoques les arbres et la faune à l'entour. Tous les patelins d'Arabie, et leurs fleurs précoces et leurs bourrasques y passent.

Une géographie idéale où les stations s'équivalent. Les femmes de la tribu sont belles et inaccessibles. Le désir violent moque ton ardeur. Il dérive sans retenue dans la joute. Il y a aussi le vin rouge et les algarades.

« Et l'amour ? Comment cela se passe, dans le désert ? Car ces gens aiment par-dessus tout ! »

Le poète se fie à sa technique et l'étendue du vocabulaire. Il a toute une année pour accomplir sa tâche.
...

Toujours plus lente, et tes gestes pris peu à peu dans la glu d'une étrange torpeur, immobile enfin, tellement perdue que ma voix ne peut plus t'atteindre.

Gustave Roud
NOIRE, telle âme en exil s'achemine lentement vers
la mort. Voici l'hiver. Le corps des mendiants se tord sur
une bouche de métro. Ce n'est pas ce froid que je crains ni la
faim du ventre bien que mendiant à ton seuil, les membres
bleus. C'était mon histoire déjà vivre pour t'aimer me perdre
dans la nuit de ma ceinture.
Je me suis masqué au moment de l'accueil.
Les amants ont souffert une passion, se sont séparés.
Gardes-tu en mémoire mon aimée cette agonie déployée dans l'
écume rose du matin
la fenêtre dans la mer demeure-t-elle reconnaissante ?

ÉCLATANTE l'âme au comble du désir
elle tourbillonne dans un ciel pur
se protège des regards envieux libre
C'est un été qui porte une moisson bénie offrande
Comment nos cœurs se sont-ils égarés dans la maison?
Il y avait un serpent pour garder le seuil éconduire
tous étrangers. Il y avait une telle impatience dans nos
corps épris… et l'été qui allait finir dans la peine.
Mais dans l'instant les amoureux chantent dansent
ne cessent de s'éblouir dans la lumière.

BLANCHE l'âme qui s'est reniée dans son âme tremblée
elle glisse sans ivresse sur le corps étendu à mi-chemin
(il dit : j'étais celui qui était mort t'attendait
dans mon cœur il y avait ton empreinte depuis longtemps
elle dit : ma vie était vide tu ne l'as pas remplie)
se discerne une trace qui est triste que tu cherches
à effacer C'est en vain que tu regardes ton visage dans
le miroir de la salle de bains Que regardes-tu la bête
terrassée… gémissante la bête aux grands yeux blesses
Elle dit : mon cœur a eu si mal tu n'as rien su faire,
pauvre cœur qui ne voit pas son âme saigner à blanc

INQUIETE mais reine mon âme dirige une cohorte d'anges
blesses au talon. Elle exhorte son armée boiteuse au martyre
comme s'il s'agissait d'aller cueillir dans les terrains de
parcours les premières fleurs du printemps. Elle se trouble à
la vue du sang qui parsème les champs mal cultives. L'été va
bientôt venir tout incendier dans la plaine. L'âme a ses
refuges haut dans la montagne (jadis la tribu y fut enfumée)
J'ai survécu aux massacres mais mon cœur a oublie le
battement familier des paupières, et le supplice.
Après si longue absence,
le cœur ne raconte plus ses exploits.
La veilleuse a cligné avant de s'éteindre au-dessus de
nos têtes flottantes.
La nuit est tombée bleu dans le jardin.

AVEUGLE âme a perdu son cœur aimant ;
elle trébuche dans la peine. Elle a mal à son cœur.
Elle s'agite comme un coq égorgé sur le trottoir.
Elle a trop mal pour le dire à tout le monde.
Elle est amoureuse à genoux et nue!
Dans le crépuscule il y a des voix distinctes du sang.
Ils sont nombreux — abandonnes — à tendre l'oreille ou le
couteau à chercher un chien dans la clairière du feu.
Avec l'été tous nos amis sont partis.
Que de souvenirs…
Au moment de l'adieu ta vie devient transparente aussi
peut-elle se
regarder sans peine.
...

Toujours plus lente, et tes gestes pris peu à peu dans la glu d'une étrange torpeur, immobile enfin, tellement perdue que ma voix ne peut plus t'atteindre.

Gustave Roud
NEUVIÈME heure s'empare de mon âme l'étrangère
s'acheminant dans l'hiver et la faim blême
au pas d'une porte là tu te plies dans la nuit
pour consulter ta vie celle transcrite
celle où tu grelottais d'aimer si fort
devant la porte close mesurais les heures
tu ne savais comment découvrir ton âme
ni accueillir la peine dans le cœur délaisse
passe la douzième heure consulte sa mémoire
pour en saisir encore l'agonie
revoir la mise en scène d'un désir décédé
le matin les surprenait écumant et rose
par la fenêtre bleue le corps gonfle de joie
et la belle endormie le jour l'étrangère

ETRANGERE corps scarifie âme bleue
elle s'offre tourbillon au comble de l'été
légère la vague éclate à la face du ciel
bénis les cœurs dilates dans la lumière
cœurs égares dans la blanche maison là
bas en bordure de la mer où dansent des rayons
il y avait une garde secrète familière
cette impatience /lustres l'été
commençant été il allait finir tel
enfer des rêves exprimes
inaccomplis ne reste que la tension sourde
des cœurs ballottes de gares routières en
paradis cœurs éblouis dans le merveilleux
instant d'abandon inconnu étrange bleue

BLEUE la transe emporte l'âme incandescente
loin de la ville où se pavanent nos rêves lourds
d'avoir rêvé à haute voix échangé
leurs secrets au grand jour c'est la jument Borâq
elle s'élève ailée ivre et tremble de s'approcher
elle me regarde dans l'âme et l'âme silencieuse
vainement le cœur ravive l'empreinte effacée
voilà qu'à nouveau ta vie s'étend dans le vide
dans l'œil qui cerne la tristesse de la bête
que tu interroges elle ne répond pas
à terre le ciel manteau qui couvre mal
le soir c'est un saignement elle reste muette
transportée dans le vide de son âme guérie
se confond avec sa veine incandescente

INCANDESCENTE mon âme / …incandescente/ aurore
dans la paume de l'aurore cœur aimant
un galet se fendille comme aimant
sur la grève l'aurore distingue une intaille
remous roses et caresses portent le cœur à l'âme
aurores successives auront poli la texture
d'où vient que la nacre s'y dépose étincelle
au premier rai sur la grève parmi les galets
celui-là seul dresse au soleil dans le blanc
de l'été - vis-à-vis des chansons - terrasses
une saison nos âmes sont blanches de feu
sur la terrasse aveugle se réjouissent chaux vive
vagues et brises murmurent dans le bleu de l'intaille
ton regard /écho à la mer cœur aurore

AURORE une puis l'autre les cordes lâchent Celles Noueuses
de maléfices… réintègrent l'œil bas le repaire
lorsque les deux amants se réveillent il fait grand jour
dans le secret de leur âme la table est servie
j'ai bien dormi /dit-il/ tu dors très bien /dit-elle/
c'est bon quand l'amour est violent comme tu le fais
je n'ai rien fait dit-il c'est un coup du destin
ce n'est pas mon corps et nous allons en mourir
pour l'instant les deux lits étaient joints la fenêtre
donnait dans le rêve à venir rose bleu et musc
l'été dans son apogée les enchantait
ce décor tombe les âmes sans cœur
se tourmentent à l'écoute la romance dénouée
et Celles dans l'aurore au guet déjà mains noueuses
...

Grise cette voix


se terre
soucieuse

ô
a chanté


a pris


corps d'évocation




En silence
au
seuil


à l'abandon

s'étendre


pierre rivière
une porte


claire
cela n'a pas duré




Rumeurs
dans le noir


sa voix se vide

amphithéâtre

saccade
cette écoute molle

là, où
nul écho ne renvoie




Retour
l'œil se retrouve


miroir
au tournoi


lâcher l'instant
que sort désigne


au point du jour
s'épuisent




Cette âme
à la tombée du jour
elle se tend


seule dans
le store
sa mémoire


ombre souvent
froidement
blâme


au même moment
se détourne de
toi
...

Habib Tengour Biography

Habib Tengour (born March 29, 1947) is a French-Algerian poet, sociologist and anthropologist. He was born in Mostaganem in eastern Algeria in 1947. The Tengour family moved to France when Habib was five years old, and he grew up there in a working-class household. He studied sociology in France and continued his studies in Algeria at Constantine University. Although his work draws heavily on various aspects of Algerian culture and tradition, Tengour writes mainly in French. His first published work was a book of surrealist poetry Tapapakitaques ou la poésie-île (1976). His principal translator in English is Pierre Joris, professor at the University of Albany. Tengour lives in Paris and Constantine.)

The Best Poem Of Habib Tengour

At The Water's Edge

Sea, you look at it you search for
a word
Waves strike the reefs

You move back from the edge
Don't get your new shoes wet

Seawater ruins leather
The state of your new shoes worries you
almost as much as the word that slips away
with the foam

Your eye swallows up the wide expanse of sea
and you feel satisfied
maybe slightly uneasy on account of the spray
or cracks
You are not kitted out for a walk…

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